IA Générative et Transition Énergétique : vers un été meurtrier ?

L’IA générative est vorace en électricité. Y en aura-t-il pour tous les usages ?

L’IA « générative », celle qui est à l’origine du ChatGPT d’OpenAI, est vorace en électricité.

Elle a débarqué, pratiquement sans crier gare, dans un système énergétique mondial qui a déjà du mal à faire face à d’autres sources de demande d’électricité, notamment pour l’électrification du parc automobile.

Or il n’est pas encore certain qu’il y aura suffisamment d’énergie propre pour répondre aux besoins de tous.

À première vue, la solution semble simple. Les data centers, tels que ceux d’Alphabet, d’Amazon ou de Microsoft utilisent pour fournir des services d’informatique dans le cloud ne représentent depuis une dizaine d’années que 1 à 2 % de la demande mondiale d’énergie. Depuis des années ils ont obtenu une efficacité énergétique toujours plus grande de leurs fermes de serveurs, alors même que la charge de travail informatique mondiale montait en flèche. En outre, ils ont investi massivement dans les énergies propres pour compenser leur empreinte carbone. Le mois dernier Amazon s’est procuré un data center alimenté par l’énergie nucléaire pour 650 millions de dollars.

Jusqu’ici, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Mais l’IA générative change la donne. Depuis l’époque où ils étaient les forces vives du boom des crypto-monnaies, les processeurs graphiques (Graphics Processing Unit, GPU), les puces sur lesquelles des modèles comme ChatGPT sont entraînés et exécutés, sont accros à l’énergie. Un rack de serveur hyperscale pré-IA consomme 10 à 15 kilowatts (kw) d’énergie. Un rack d’IA consomme 40 à 60 kw. Les calculs ne sont pas les seuls à consommer de l’électricité. Le refroidissement des racks de GPU nécessite tout autant d’énergie. En outre, une grande partie de la demande d’énergie liée à l’IA au cours de l’année écoulée provient des formateurs de modèles « de base » tels que GPT-4, la dernière offre d’OpenAI. L’utilisation généralisée de ces modèles en tant qu’outils – pour la recherche, la réalisation de vidéos, l’habillage du pape en Balenciaga – pourrait accroître la pression sur le réseau.

Une recherche par ChatGPT peut consommer dix fois plus d’électricité qu’une recherche via Google.

Le boom de l’IA générative n’en est qu’à ses débuts, il est donc trop tôt pour faire des prédictions. Mais les estimations sur l’accroissement de la demande d’énergie induite sont frappantes. L’ Agence internationale de l’énergie affirme que d’ici 2026 les data centers pourraient consommer deux fois plus d’énergie qu’il y a deux ans – et autant que ce que le Japon consomme aujourd’hui. L’Agence s’attend à ce que les data centers représentent un tiers de la nouvelle demande d’électricité aux USA au cours des deux prochaines années. D’autres prédisent que d’ici la fin de la décennie les data centers destinés à l’IA pourraient consommer jusqu’à un quart de toute l’électricité nord-américaine, contre 4 % ou moins aujourd’hui.

Il ne fait aucun doute que la créativité sera au rendez-vous. La solution la plus évidente consiste à rendre les GPU plus économes en énergie. Nvidia, leur principal fournisseur, affirme y être déjà parvenu avec sa dernière génération de serveurs d’intelligence artificielle. Toutefois, des puces plus efficaces peuvent simplement stimuler une plus grande utilisation.

Si les énergies renouvelables viennent à manquer, cela aura un coût.

Personne ne sait encore comment l’IA générative gagnera de l’argent. Ce que l’on sait, c’est que le coût d’acquisition des GPU monte en flèche. Si le coût de l’énergie nécessaire à leur fonctionnement augmente lui aussi, la croissance de l’IA Générative pourrait être freinée. En outre, l’électrification du reste de l’économie dépend fortement des coûts ; une course à l’énergie propre entre l’IA et les véhicules électriques ferait grimper les prix et ne servirait les intérêts d’aucune des deux industries. Et pour l’instant aucune solution n’apparait à l’horizon.

Or l’économie n’est que de l’énergie transformée. Si le prochain été est caniculaire il nous faudra choisir entre la clim, l’IA et la voiture. L’été risque d’être meurtrier.

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