En quoi APPLE peut-elle se permettre de donner des leçons à FACEBOOK ?

En quoi Tim COOK peut-il se mettre en avant pour donner des leçons à Mark Zuckerberg ?

Si le track record de FACEBOOK en termes de respect des données personnelles est désastreux, et je pense avoir été l’un des premiers à le souligner en France, que ce soit sur ce Blog ou ailleurs, APPLE peut-elle se positionner en donneur de leçon ?

Que nenni !

La réponse de Zuck aurait pu être plus caustique envers Tim et la firme à la Pomme. Voici pourquoi :

Décembre 2015 : Apple
fait un doigt d’honneur au gouvernement américain enquêtant sur un acte
terroriste. 
Décembre 2017 : Apple nie l’évidence de l’obsolescence
programmée des iPhone. 
Tout est pardonné à la firme de Cupertino, qui caracole
en tête des capitalisations boursières mondiales. 
Pourquoi ?
Du temps de Steve Jobs, Apple n’a
eu aucun souci à se faire quant au comportement de son CEO charismatique – pour
le moins détestable et totalement autocentré – pas plus quand a été découvert l’octroi
à son profit de stock-options antidatées
. Aucun autre CEO d’une entreprise nord-américaine
ne se serait sorti indemne d’une telle manœuvre frauduleuse.
En décembre 2015, quand le FBI
demande à Apple un accès aux données de l’iPhone d’un terroriste, Tim Cook
refuse avec indignation au nom des Libertés et s’en trouve ovationné. Imaginez
ce qui se serait passé si BlackBerry avait réagi ainsi ? Ou que, dans le
même ordre d’idée, Ford refuse de laisser la Police ouvrir un coffre de voiture
où pourrait être détenu un otage ?
En décembre 2017 il devient
évident qu’Apple a organisé l’obsolescence programmée de ses iPhone. Le cours
de bourse de la firme de Cupertino ne décroche pas pour autant :
actionnaires et analystes sont confiants, la marque est inoxydable.
Ne nous étendons pas sur
l’évasion fiscale érigée en système ou le fait qu’Apple ait toujours trouvé
l’inspiration chez les autres (en non politiquement correct, « volé leurs
idées »). Il ne s’agit là que d’un comportement commun à l’ensemble des
GAFA.
Admettons que Steve Jobs soit
devenu le Christ de l’Economie de l’Innovation et que sa réalisation la plus
étincelante, l’iPhone, en soit devenu le Calice. Les Apple Stores sont les
chapelles où viennent communier les fidèles.
Si nous pouvons concevoir qu’une idolâtrie
sectaire puisse satisfaire une minorité, comment se fait-il qu’Apple soit aussi
convaincant pour la majorité des citoyens et par-delà pour les gouvernements
qui ferment les yeux sur ses agissements ? 
Nous pensons qu’une combinatoire
de deux facteurs explique cette situation :  Steve Jobs a fait d’Apple une marque de Luxe
et nous avons fait de l’iPhone, nous, citoyens-consommateurs, une extension de
notre moi le plus intime.
Steve Jobs s’est inspiré de
l’industrie du luxe pour définir sa stratégie. Il a ainsi permis à une
entreprise de la Tech de s’affranchir de cycles courts et de marges incertaines.
En cela il a été un génie. Le fait de faire passer Apple de la Tech au Luxe est
l’une des décisions qui a eu le plus de conséquences en termes de création de
valeur ces 50 dernières années. Les entreprises de la Tech peuvent croître mais
rarement pendant longtemps. Apple, en devenant une marque du secteur du luxe, s’est
affranchi de ces cycles, lui permettant ainsi de devenir, à l’aune de ses
profits, le plus grand succès entrepreneurial de tous les temps.
Le luxe est l’équivalent-marché
des plumes pour un oiseau. C’est irrationnel et sexuel, cela submerge les esprits
chagrins, les signaux rationnels du cerveau tels que « tu peux pas te le
permettre » ou « cela n’a aucun sens ».
Apple partage 4 des 5 attributs qui
caractérisent toute entreprise du secteur du luxe : un fondateur iconique,
une intégration verticale (avec les Apple Stores, LE vrai coup de génie de Jobs),
une audience globale et un prix élevé. Seul le savoir-faire artisanal n’est pas
partagé et c’est là que réside le tour de force : réussir à valoriser au prix de
l’objet artisanal un produit manufacturé en masse – tout en affichant des
craintes de pénurie, et donc de rareté.
Mais l’icône d’Apple est non
seulement perçue comme un produit de luxe mais également comme une extension de
notre moi
C’est cette combinatoire qui
décuple notre fascination pour cet objet.
Il s’agit à la fois d’un accessoire
intime, porteur de nos envies, de nos passions, mais aussi d’un objet qui se
montre (sinon ce ne serait pas un objet de luxe). L’iPhone : un plumage
qui sublime et exhibe notre moi pour accroître notre attractivité sexuelle.
Ainsi nous étions autrefois ce
que nos habits disaient de nous, certains considèrent que nous sommes ce que
nous mangeons mais il est certain que nous sommes devenus ce sur quoi nous
postons nos messages.
Objet d’exhibition de
l’attractivité sexuelle de notre moi, nous fétichisons l’iPhone et par-delà son
démiurge, Apple.
Nous
avons ainsi ouvert la porte à l’émergence d’un nouveau genre
d’extrémisme : l’extrémisme d’entreprise.
Il ne s’agit pas d’un extrémisme
qui nous menace physiquement mais ses conséquences sont néanmoins dangereuses
pour notre société
Pourquoi ? 
Parce qu’il nous amène, par notre
aveuglement consentant, par une vénération laïque de l’objet de nos désirs, à
accepter qu’une entreprise puisse ne pas se conformer à la loi
Et en cela nous
sapons collectivement le fondement de l’Etat de droit.
D’une certaine manière, les
citoyens et les gouvernements ont décidé, nous avons décidé, que Jobs et Apple
n’étaient plus soumis à la loi. 
Cela Apple l’a bien compris et veut, de toute
force, que cela se sache pour en user à son profit. 
Ce système de deux poids deux
mesures, pour une entreprise de cette taille, pour qui la course au profit est
l’objectif – et c’est bien normal de la part d’une entreprise – constitue alors
une véritable menace.

Espérons
que l’arrogance de la firme de Cupertino finisse par agacer le citoyen lambda et
le législateur…

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